Les « recommandations » ministérielles sur les méthodes pédagogiques à privilégier en primaire s’inscrivent en fait dans la continuité de pratiques déjà largement répandues. Le ministère de l’éducation nationale a publié, jeudi 26 avril, des « recommandations » aux enseignants du primaire.

 

Il s’agit de quatre circulaires qui détaillent des recommandations pédagogiques pour « faciliter l’apprentissage des savoirs fondamentaux : lire, écrire, compter, respecter autrui », selon leur présentation officielle. « L’idée n’est pas d’homogénéiser les pratiques mais de créer une référence commune », plaide le ministre Jean-Michel Blanquer dans une interview au Parisien.

A en croire de nombreux titres de presse et réactions, cette initiative serait un « retour aux fondamentaux », salutaire pour certains, passéiste pour d’autres. « Dorénavant, grâce à un retour aux fondamentaux, nos enfants seront éduqués “à l’ancienne” : une dictée et quinze minutes de calcul mental par jour, cinq à dix livres à étudier dans l’année et l’utilisation d’un manuel de lecture imposée », lit-on par exemple dans le quotidien bourguignon Le Bien public.

Une version que Jean-Michel Blanquer n’a pas reprise à son compte : « Je ne prétends pas que tout va mal ou que rien n’existait jusqu’ici, a-t-il expliqué au Parisien. Fort heureusement, dans la majorité des écoles, les pratiques des enseignants correspondent à nos recommandations. Mais ils y sont parvenus par tâtonnements. Désormais, il existe une référence. »

Si le ministre insiste fortement sur le « lire, écrire, compter », il serait erroné de prétendre que ces apprentissages fondamentaux étaient en voie de disparition à l’école. La plupart des recommandations publiées jeudi sont en réalité loin de réclamer une rupture dans les pratiques pédagogiques. Plus que de « retour des fondamentaux », il s’agit plutôt de piqûres de rappel. Illustration en trois exemples :

1. La dictée quotidienne, une recommandation de longue date

La « dictée du jour » figure parmi les « consignes » du ministre aux enseignants. Elle figurait aussi au programme de sa prédécesseure Najat Vallaud-Belkacem, qui avait, elle aussi, réclamé le retour de la dictée quotidienne en 2015. Les programmes du CP à la troisième mis en place à l’époque mentionnent d’ailleurs bien des activités d’écriture « quotidiennes », qui peuvent être des dictées, sous différentes formes, mais pas seulement.

Preuve que ce débat revient sur la table périodiquement, le retour de la dictée à l’école avait été promis par Luc Chatel en avril 2012, déjà. Ou encore par François Fillon, en 2004.

2. L’apprentissage de la grammaire n’avait pas disparu

Contrairement à ce que certaines présentations des circulaires ont pu laisser entendre, il n’est pas plus question de « retour » des leçons de grammaire. Si M. Blanquer a déploré qu’elles soient absentes, selon lui, « dans certains cahiers d’élèves », elles restent à l’évidence attendues dans les programmes. Ce que la circulaire ministérielle du 26 avril dit elle-même :

« A tous les niveaux de la scolarité obligatoire, l’enseignement de la langue est donc mené systématiquement, et la leçon de grammaire et de vocabulaire […] doit être pratiquée conformément aux programmes, qui affirment la place importante des séances qui leur sont consacrées. »

3. Le calcul mental régulier était déjà au programme

Autre souhait du ministre, faire quinze minutes de calcul mental par jour en classe. La consigne n’était certes pas formulée aussi précisément auparavant, mais force est de constater que les programmes actuellement en vigueur mettaient déjà, là aussi, fortement l’accent sur cette pratique fondamentale.

La pratique du calcul mental était ainsi fortement prescrite aux cycles 2, 3 et 4, c’est-à-dire sur l’ensemble de l’élémentaire et du collège. « La pratique quotidienne du calcul mental conforte la maîtrise des nombres et des opérations », lit-on ainsi dans l’introduction du programme de mathématiques du CP au CE2. Et la « pratique régulière » du calcul mental reste conseillée jusqu’à la classe de troisième.

Source : le Monde/ 27.04.2018/ Par Adrien Sénécat

 

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